Maurice Blondel, grand philosophe français, s´est attaqué dans cet ouvrage à la question philosophique de l´action. Étant en même temps une réalité et une nécessité, l´action, dans l´existence et pour l´existence, s´impose à l´être qui la produit ; et cependant, dans bien des cas, l´être a conscience de la vouloir : comment donc expliquer ce double principe d´autonomie et d´hétéronomie qu´elle enveloppe ?
Maurice Blondel est le premier à avoir osé, non seulement un examen approfondi de l'action, mais aussi et surtout à avoir adopté pleinement ce concept (encore inconnu à l'époque) comme centre de ses recherches philosophiques.
Ce livre, par la profondeur et la clarté de ses idées, l´heureuse abondance de ses formules et la parfaite sincérité de ses conclusions, nous invite à la réflexion.
EXTRAIT : « Selon l´opinion commune, l´action semble plus facile à saisir que l´invisible et fuyante pensée, plus directement connaissante que l´être, toujours mystérieux en son fond. Volontiers on se persuade que, se traduisant en résultats palpables, l´action se prouve elle-même, sans qu´on ait à revenir sur l´évidence obvie des faits incontestables qui servent de données et d´appui aux analyses scientifiques et aux spéculations ultérieures de la philosophie. Mais les philosophes eux-mêmes ont-ils, plus que le vulgaire, replié leur réflexion sur ce qu´il y a de direct, d´initiateur, de spécifique en tout agir, quelle que soit la diversité des applications qui peuvent être faites d´un élan dont les uns pensent avoir tout dit quand ils l´ont qualifié de créateur, dont les autres estiment avoir fait justice quand ils le ramènent à l´entrecroisement des impulsions passives et au déterminisme universel ? On a donc plutôt étudié les multiples aspects des faits particuliers auxquels on applique le terme d´action qu´on ne s´est attaché à l´agir lui-même ; et peut-être s´est-on moins soucié de définir « l´acte d´agir » (si l´on ose risquer ce pléonasme) que d´examiner les productions ou les divers modes de l´action.
Notre premier devoir est donc ici de montrer que, au sens fort et singulier du mot, l´action fait problème ; et nous devons d´abord, sans que le lecteur ait à se décourager devant une difficulté vraiment captivante, entrevoir dès le seuil l´étendue du champ à explorer, le sens et la portée des solutions à procurer. Les questions en effet se pressent devant nous : elles peuvent au premier abord paraître ardues, mais on ne saurait en méconnaître l´intérêt vital, non plus que l´importance spéculative, puisqu´il s´agit d´une réalité coextensive à tout ce qui est, à tout ce qui pense. Et pourtant qui est en état de répondre à cette simple demande : qu´est-ce qu´agir, sans risquer de restreindre, de dénaturer, de contaminer la pure et entière signification de ce petit mot, si employé, si net, et néanmoins si réfractaire à une définition. »